- S’il n’y avait pas de fuite des capitaux, l’Afrique Saharienne n’aurait besoin ni d’investissements directs étrangers ni d’aide public au développement.
- Le Nigéria dont le gouverneur de la Banque centrale a été limogé parce qu’il dénonçait le phénomène, arrive en tête avec près 15 milliards par an
- Les compagnies minières sud-africaines ont transférer plus de 122 milliards de dollars sur les 10 dernières années
Rien qu’en 2012, ce serait quelque 68,6 milliards de dollars que les pays d’Afrique Subsaharienne ont vu sortir illégalement du territoire. Le phénomène est d’autant significatif que GFI le compare à l’aide publique au développement (APD) qui n’est que de 39,9 milliards de dollars et aux investissements direct étranger (IDE), également 39,9 milliards de dollars, déversés dans les économies subsahariennes. Le cumul de l’APD et des IDE se monte à quelque 79,8 milliards de dollars. C’est dire que la fuite des capitaux dépasse largement l’aide publique au développement et l’les IDE pris individuellement.


Source : GFI-décembre 2014
Sanusi Lamido doit son limogeage à la fuite des capitaux
Le Sénégal premier de la classe
L’ampleur du phénomène au Nigéria et en Afrique, ne doit tout de même pas occulter le fait que tous les pays soient touchés. Néanmoins, le Sénégal ne se classe 145ème sur 145 pays en développement et n’est pratiquement pas touché par le phénomène. Moins d’un million de dollars quitte illégalement le pays chaque année. Et sur les 10 dernières années, le pays n’a perdu que 15 petits millions de dollars, transférés illégalement. Cela s’explique par la bonne gouvernance, mais également la faiblesse de la présence des multinationales dans l’économie sénégalaise, lesquelles, il faut le rappeler, sont responsables de la plupart des transferts illégaux. Autre pays, ayant un bon score, la Tunisie. En effet, ce ne sont que 28 millions de dollars qui auraient quitté l’économie du pays de manière illégalement en 2012. Le pays se classe ainsi troisième africain, derrière le Sénégal et Sao-Tomé et Principe, et 138ème mondiale. Le Cap-Vert et le Bénin ont échappent également à cette fuite des capitaux et viennent donc sauver l’Afrique de l’Ouest. Mais néanmoins, pour des économies aussi modestes que les leurs, la moyenne qu’ils affichent est relativement inquiétante. Leurs économies laissent échapper autour de 41 millions de dollars par an, soit plus de 20 milliards de FCFA par an.
Pour le Nigéria c’est un secret de polichinelle. Le comble c’est que l’ancien gouverneur de la Banque Centrale du géant de l’Afrique de l’Ouest, a été limogé par le président Goodluck Jonathan, parce qu’il a osé dénoncer le phénomène publiquement. La fin du premier mandat de gouverneur de la Banque centrale de Lamido Sanusi était prévue pour juin 2014, mais a été brutalement interrompu alors qu’il s’était attaqué aux irrégularités dans la gestion de la compagnie pétrolière nationale, la Nigerian National Petroleum Corporation (NNPC). Il l’accusait de ne pas avoir reversé 20 milliards de dollars aux caisses de l’État. La NNPC a rejeté ces affirmations à plusieurs reprises. Mais le gouverneur de la Banque Centrale avait parlé de près de 60 milliards dollars qui n’ont jamais été rapatrié par le géant du pétrole. Mais, Au lieu de s’estimer heureux d’avoir une Banque Centrale vigilante et d’entamer une enquête pour clarifier tout ça, Goodluck Jonathan, le président Nigérian a simplement préféré se séparer de Sanusi Lamido tout en l’intimidant, en lui confisquant son passeport. Mais heureusement, la justice Nigériane a estimé que la mesure était illégale et a condamné l’Etat à lui reverser 300.000 dollars en dommages et intérêt.


Fuite des capitaux par zone géographique
La fuite des Boers et des mines
La Chine et la Russie en tête
Tous pays confondus, ce sont la Chine et la Fédération de Russie qui sont les plus touchées par la fuite des capitaux, avec respectivement 125 et 97 milliards de dollars en moyenne annuelle. Sachant que la Chine veut faire de sa monnaie le Renminbi ou le yuan, une devise internationale, il y a donc une grande marge pour agir. En effet, non seulement la fuite des capitaux affaiblit les économies, mais elle empêche d’avoir une devise forte. Les transactions illégales se faisant essentiellement dans des devises étrangères et les auteurs acceptent de perdre au change dans les marchés noirs.
Mais les mines, elles, sont bien en Afrique du Sud, qui est un scandale géologique. Et comme l’affirme le GFI, les fausses facturations dans des opérations d’importations et d’exportations sont à l’origine d’une partie importante des transferts illégaux de capitaux. Cela passe souvent par des mécanismes assez complexes de trading à trader des places financières internationales. Quoi qu’il en soit, en 10, plus de 122 milliards de dollars ont illégalement échappés à l’économie sud-africaine.
L’ampleur du phénomène pour ces deux pays, ne doit tout de même pas occulter le fait que tous les pays soient touchés.
Tableau : Les pays les plus touchés par la fuite des Capitaux (2003-2012)
Rang |
pays |
Moyenne (2003-2012) MM $US |
Cumul (2003-2012) MM $US |
1 |
RP Chine |
125,242 |
1,252,419 |
2 |
Fédération Russe |
97,386 |
973,858 |
3 |
Mexique |
51,426 |
514,259 |
4 |
Inde |
43,959 |
439,587 |
5 |
Malaisie |
39,487 |
394,869 |
6 |
Arabie Saoudite |
30,862 |
308,620 |
7 |
Brésil |
21,710 |
217,103 |
8 |
Indonésie |
18,784 |
187,844 |
9 |
Thaïlande |
17,168 |
171,679 |
10 |
Nigéria |
15,746 |
157,455 |
11 |
Emirats Arabes Unis |
13,530 |
135,300 |
12 |
Afrique du Sud |
12,214 |
122,145 |
13 |
Irak |
11,137 |
89,098 |
14 |
Costa Rica |
9,403 |
94,034 |
15 |
Philippines |
9,349 |
93,494 |
Source : GFI-décembre 2014