Les partenaires techniques et financiers du Sénégal, réunis à Paris les 24 et 25 février, ont annoncé des engagements de l’ordre de 3700 milliards de FCFA (5,6 milliards d’euros) en appui au Plan Sénégal Emergent. Mais que contient ce programme qui s’il est mis en œuvre peut changer le visage du Sénégal ?
En juillet dernier, le président sénégalais en visite au Maroc avait laissé entendre que son gouvernement allait engager le cabinet McKinsey pour l’élaboration d’une stratégie pour l’émergence du Sénégal. Depuis, tout le monde avait compris que, dans l’esprit du chef de l’Etat sénégalais Macky Sall, la Stratégie nationale de développement économique et social (Sndes) n’entrait plus dans ses projets pour le développement du pays. Résultat : l’Association Disso, un groupe de Sénégalais, pour la plupart vivant à l’étranger, fut dessaisie du projet qui sera alors confié au cabinet international McKinsey. Et là encore, le document rendu par ce dernier suscitera de très nombreuses critiques de la part des membres du gouvernement eux-mêmes, ainsi que le secteur privé à cause de ses faiblesses manifestes qui vont finir par convaincre le chef de l’Etat, de revoir le Plan Sénégal émergent (PSE), pourtant l’un des fervents défenseurs.
Il faut dire que pour en arriver là, l’Etat sénégalais a dépensé pas moins de 2,5 milliards de FCFA. Et par conséquent, le gouvernement a d’emblée chargé l’administration sénégalaise de réfléchir rapidement à un autre plan de remplacement qui intégrera les éléments positifs de la Sndes et du PSE. C’est ainsi que tous les services de l’Administration sénégalaise susceptibles d’y contribuer sont mobilisés surtout que le temps est compté. Car, le pays prépare son rendez-vous du Club consultatif de Paris avec les différents bailleurs de fonds.
Pour ne pas aller au-devant d’une grosse désillusion, le président sénégalais prit la décision de demander à ses argentiers de reporter la rencontre du Club de Paris, afin de mieux la préparer et d’obtenir un gros succès. Alors, la rencontre prévue pour les 21 et 22 octobre 2014, fut reportée, pour les 24 et 25 février 2014, repoussée donc de quatre mois afin d’affiner le Plan Sénégal émergent (PSE). En effet, ce Club de Paris devrait servir à financer ce programme qui vise à permettre au Sénégal de réaliser une croissance économique d’au moins 7 % à l’horizon 2018, contre 4,6 % actuellement. Il doit aussi l’aider à atteindre le statut de pays émergent en 2035.
Partis avec une forte délégation défendre son plan, le président Macky Sall et son gouvernement ont fait, une bonne moisson d’« engagements nouveaux » de la part des partenaires techniques et financiers.

Le Sénégal a obtenu lundi 24 février 2014 à Paris des engagements financiers internationaux de 3.729 milliards de FCFA (5,6 milliards d’euros) pour mettre en œuvre son plan. Ces nouveaux engagements des bailleurs viennent s’ajouter aux 2.056 milliards FCFA d’engagements en cours. Ce qui fait au total 5.785,4 milliards FCFA d’engagements, a précisé le président Sall lors de la conférence de presse à l’issue des deux journées. « Il s’agit d’un grand succès pour le Sénégal », s’est-t-il réjoui, soulignant que ce résultat obtenu après plusieurs mois de travail, ne vise qu’un seul et même objectif : le bien-être de tous les Sénégalais et un développement homogène et inclusif.
Il a expliqué que c’est la raison pour laquelle son gouvernement a tant insisté sur la politique sociale à travers la bourse de sécurité familiale et la couverture maladie universelle. De l’avis du président sénégalais, c’est le secteur des infrastructures qui a bénéficié de plus de financement des bailleurs de fonds (46%), suivi de l’agriculture, l’énergie, l’éducation et la formation. « Le Sénégal a eu la confiance des bailleurs de fonds dans son plan de développement économique et social. La crédibilité de notre gouvernement, de nos choix politiques a été confirmée », s’est-il félicité à l’issue de la première journée à Paris de la réunion du Groupe consultatif pour le Sénégal, rassemblant les bailleurs de fonds au siège de la Banque mondiale. « Il nous appartient maintenant de mériter toute cette confiance », a poursuivi le chef de l’Etat, en insistant sur les réformes pour la modernisation de l’administration et la transparence dans la gestion des affaires publiques, ainsi que la protection sociale.
Aux yeux du gouvernement sénégalais, le pays fait face à des défis critiques qu’il entend relever et par-delà mener à bien ses ambitions à travers un agenda de transformations économiques et sociales, pour se diriger sûrement vers l’émergence. Pour s’inscrire dans cette dynamique de long terme, l’Etat mise sur des valeurs comme la vertu et la gouvernance au service du développement humain durable.
Ainsi, selon le document du PSE distribué aux partenaires techniques et financiers lors du la rencontre de Paris, en 2035 la société sénégalaise serait caractérisée par une économie compétitive soutenue par une croissance forte aux fruits mieux répartis, sur l’ensemble du territoire ; une population instruite, bien formée et engagée au niveau des communautés locales et nationale, une meilleure qualité de vie ; la paix, la stabilité et la démocratie ; la bonne gouvernance et l’aménagement dynamique et équilibré des territoires.
Pour y parvenir, le gouvernement mise d’abord sur le Plan Sénégal Emergent (PSE) qui vise à mettre en place d’ici à 2023, un ensemble de projets structurants à fort contenu de valeur ajoutée et d’emploi. Pour l’étape intermédiaire de 2018, la stratégie, est déclinée autour de trois axes stratégiques : transformation structurelle de l’économie et croissance ; capital humain, protection sociale et développement durable ; et gouvernance, institutions, paix et sécurité. Aussi, l’opérationnalisation de la stratégie exige la mise en place d’un ensemble de réformes pour accélérer le processus de transformation structurelle susceptible d’accélérer le décollage économique.
Se voulant un cadre fédérateur des interventions et politiques publiques, le PSE 2014-2018 prend comme repère les orientations gouvernementales et le cadre d’accélération des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) à l’horizon 2015. Cette présente stratégie, cherche d’abord à infléchir d’ici à l’horizon 2018, les tendances lourdes identifiées par la rétrospective socio-économique. Ensuite, elle voudrait tenir compte des facteurs déterminants et enfin intégrer le jeu des acteurs révélé par la participation des parties prenantes dans la mise en œuvre.
Le gouvernement sénégalais mise sur ses atouts et opportunités pour enclencher la marche vers l’émergence. Il s’agit, entre autres, de la stabilité politique et la solidité des institutions ; la viabilité du cadre macroéconomique ; le potentiel démographique résultant de la jeunesse de la population ; le potentiel de ressources agricoles et hydro-agricoles ; sa position géographique stratégique ; de réelles potentialités naturelles sous-exploitées ; et le dynamisme de sa diaspora.
La mise en œuvre du PSE sera alimentée par les politiques sectorielles et les Cadres de dépenses sectoriels à moyen terme (CDSMT) qui s’érigent en instruments opérationnels. A cela s’ajoutent les instruments innovants de financement de l’économie, à savoir le FONGIP, le FONSIS, la BNDE, la CDC ou la finance islamique. Cependant, le Plan d’actions prioritaires (PAP 2014-2018) dégage un besoin de financement additionnel de 2 964 milliards de FCFA à rechercher. Le Groupe consultatif à Paris au siège de la Banque mondiale s’inscrit dans ce cadre pour mobiliser ce gap.