Montée des eaux du lac Tanganyika, inondations, crues des rivières, glissements de terrain, … le Burundi subit des pertes énormes suite aux effets de changements climatiques. Les victimes sont estimées à plus de 100 000 personnes en besoin d’une assistance. Le pays appelle à l’aide de la Communauté internationale pour y faire face. Reportage
Jadis très attrayantes, fréquentes, … les plages du lac Tanganyika sont devenues méconnaissables. Inondées. Les eaux du lac Tanganyika les ont envahies, y apportant différentes sortes de déchets en plastiques, une preuve du degré de préservation que la population attache à ce patrimoine naturel.
La nature en furie
La plage dénommée Safi Beach qui accueillait des milliers de personnes surtout les week-ends n’est plus. Les espaces réservés aux jeux d’enfants sont détruits.
Des hôtels, des bar-restaurants, des infrastructures publiques comme le port de Bujumbura, les routes, … subissent les mêmes assauts.
A ce seul port que dispose le pays, les dégâts sont déjà énormes : certains bureaux ont déjà fermé, d’importants espaces qui étaient réservés au parking des camions, entrepôts des marchandises, … déjà inondés. Ce qui affecte aussi les travaux qui étaient en cours pour la modernisation de ce port.
Les bureaux de l’Office burundais des recettes (OBR) sont aussi affectés. L’Avenue du Japon longeant le lac Tanganyika n’est plus praticable. Elle est fermée.
Au sud de Bujumbura, dans la zone Kinindo, commune Muha par exemple, des centaines des maisons d’habitations sont inondées. Les habitants ont déjà vidé les lieux. A côté des pertes matérielles, une personne a été emportée par les crues de la rivière Kanyosha, dans le quartier Kibenga-Lac.
Le parc national de la Rusizi n’est pas épargné
A Gatumba, une zone de la commune Mutimbuzi, ouest de Bujumbura à la frontière burundo-congolaise, la situation est catastrophique. Des milliers de personnes se trouvent les pieds dans l’eau. Elles passent à la belle étoile. La route Bujumbura-Uvira est inondée aussi, rendant la circulation très difficile. Les crues de la rivière Rusizi et la montée des eaux du lac Tanganyika n’épargnent pas le parc national de la Rusizi. Ses bureaux administratifs ne sont plus accessibles. Des animaux de ce parc comme les antilopes sont en débandade.
A côté des inondations, crues de rivières, des glissements de terrain font rage. En commune Muhuta, province Rumonge, au sud de Bujumbura, la capitale économique, ce vendredi 19 avril, un glissement de terrain sur la colline Gabaniro a fait une personne morte, quatre blessées, 2.485 déplacés, 375 maisons détruites, 500 hectares de champs agricoles totalement ravagés selon l’administration provinciale. Cette même source ajoute que tous les bâtiments du projet Kirasa Energy ont été totalement détruits. Ces derniers étaient destinés à héberger le personnel, le staff affecté à la construction du barrage hydroélectrique de Kirasa.
Appel à l’aide
«Le gouvernement du Burundi et les acteurs humanitaires ont besoin de ressources financières pour faire face aux défis croissants en vue d’éviter une aggravation de l’impact des inondations, des glissements de terrain, des vents violents et de la grêle », lit-on dans un communiqué conjoint du ministère de l’Intérieur, du Développement communautaire et de la Sécurité publique et du Système des Nations-unies au Burundi sur les impacts du phénomène El Niño.
Ce même communiqué souligne que cet appui est une nécessité en vue de l’opérationnalisation du mécanisme national d’alerte précoce multirisque tout en précisant qu’avec les effets du phénomène El Niño, 306 000 personnes sont dans le besoin d’assistance humanitaire.
Via ce communiqué, on indique que depuis les deux dernières décennies, le Burundi connaît des phénomènes météorologiques et climatiques extrêmes dont les effets deviennent de plus en plus dévastateurs.
«Les fortes précipitations dues au phénomène El Niño provoquent de graves inondations liées aux débordements des rivières et à la montée des eaux du lac Tanganyika. De plus, les glissements de terrain, les vents violents et les grêles continuent d’exposer les communautés aux différentes vulnérabilités. »
Et le bilan est vraiment lourd. D’après ce communiqué, la combinaison de ces aléas climatiques a occasionné des pertes en vies humaines ; des déplacements internes de population ; des destructions des champs de culture, des moyens de subsistance, des habitations et des infrastructures socio-économiques.
Entre septembre 2023 et le 7 avril 2024, 203 944 personnes ont été affectées en plus de 19 250 habitations et 209 salles de classe qui ont été détruites. Le nombre de personnes déplacées internes a également augmenté de 25% pour atteindre plus de 98 000 personnes », précise-t-il, notant que pour la même période, plus de 40 000 hectares de champs de cultures détruits.
Le gouvernement prévient d’ailleurs que des fortes pluies vont continuer à être observées pour le mois de mai : « Selon les prévisions météorologiques saisonnières de l’Institut géographique du Burundi (IGEBU ), pour la période allant de mars à mai 2024, les précipitations attendues seraient sensiblement au-dessus de la normale climatologique et risquent d’aggraver la vulnérabilité ainsi que l’exposition des communautés, de leurs biens, des infrastructures socio-économiques et de l’environnement.»
Ainsi, lance-t-il, pour alléger la souffrance des communautés affectées par les effets pervers du phénomène El Niño, ‘’nous appelons la communauté internationale à appuyer davantage le gouvernement dans ses efforts de réponse aux besoins prioritaires des personnes touchées et d’apporter des solutions durables.»