L’Afrique vit au rythme des élections : Burundi, Rwanda, Congo, Niger, Sénégal, Tchad, RDC… Mais ce qui devait être considéré comme un signe de vitalité démocratique est vu plutôt comme un retour à l’avant Discours de la Baule du 20 juin 1990. L’aide de la France et, de manière générale, celle de l’Occident, n’étant plus ce qu’elle était, l’Afrique prend ses distances avec une démocratie qui « ne se mange pas ». Elle cherche surtout à s’adapter au lieu d’adopter. Avec des résultats mitigés.
Pour les pays africains, anciennes dépendances de la France, le Discours de La Baule prononcé par François Mitterrand, le 20 juin 1990, dans le cadre de la 16ème Conférence des chefs d’État d’Afrique et de France, un nouveau modus vivendi s’instaure. La démocratie est un choix irréversible certes mais chaque pays l’adapte à sa situation propre.
Ce n’est plus une «recette» découlant des relations entre la France et l’Afrique ou du regard des Etats Unis d’Amérique sur le monde. On peut même dire que l’Afrique «résiste», comme le font des pays arabes où la démocratie a été rejetée de manière violente (Libye, Syrie, Yémen, Irak…). L’adaptation aux contextes spécifiques, comme au Rwanda et au Congo, est présentée comme la panacée contre les nouveaux maux de l’Afrique. Le modèle occidental des deux mandats est ainsi remis en cause par une sorte de «sous évaluation» temporelle qui ne manque pas de pertinence. Car si le Président élu en Europe ou aux USA arrive pour assurer une continuité, son homologue africain amorce, souvent, un nouveau départ.
Cependant, dans ses grandes lignes, le Discours de La Baule reste d’actualité. Et Roland Dumas, ancien ministre des Affaires étrangères de Mitterrand, a parfaitement raison d’avoir dit, un jour, que «Le vent de liberté qui a soufflé à l’est (en 1889) devra inévitablement souffler un jour en direction du sud (…). Il n’y a pas de développement sans démocratie et il n’y a pas de démocratie sans développement». Ce dernier aspect est essentiel.
Les relations avec l’Afrique sont sorties d’un contexte de la guerre froide, fondées sur une sécurisation des approvisionnements sans réelle considération pour le respect des droits de l’Homme et de la démocratie de la part des pays exportateurs, pour entrer dans celui d’un enfermement de l’Europe sur elle-même. Cette attitude explique, en partie, la montée en puissance de la Chine et de l’Inde avec, comme corollaire, la «résistance» de l’Afrique au changement. Si le Discours de La Baule représentait un pas en avant vers la conditionnalité des échanges, poussant les pays d’Afrique à accélérer leur processus de démocratisation, le rétrécissement de l’APD (Aide publique au développement) et la fermeture des frontières de l’Europe expliquent la remise en cause des préceptes démocratiques et l’apparition des nouveaux périls.