La stratégie déployée par Pékin pour développer ses intérêts commerciaux en Afrique a été accompagnée d’une politique prudente de neutralité, mais le conflit dans les provinces du Kivu à l’est de la République démocratique du Congo (RDC) a provoqué un changement d’approche. Pékin ne peut plus se réfugier derrière une attitude de Ponce Pilate au nom de la soi-disant «non-ingérence dans les affaires intérieures des Etats.»
Le Rwanda a été largement accusé d’attiser les combats dans cette région riche en minerais et Pékin, qui entretient des relations étroites tant avec Kinshasa qu’avec Kigali, s’est joint aux critiques ces dernières semaines. La Chine s’efforce toutefois de maintenir de bonnes relations avec les deux pays, tout en continuant d’exploiter ses entreprises et d’acheter des minerais cruciaux.
Pendant des décennies, la Chine a pris soin de ne pas prendre parti dans les conflits en Afrique, afin d’éviter de contrarier ses intérêts économiques. Jusqu’à présent, sa diplomatie s’est toujours abstenue de critiquer les gouvernements africains qui soutenaient des participants à un conflit. Par exemple, la Chine est restée silencieuse sur les coups d’Etat intervenus au Sahel, si ce n’est pour exhorter les dirigeants «à prendre en compte les intérêts de la population.»
Politique de non ingérence de Pékin
Selon le professeur Zhou Yuyuan, spécialiste du développement et de la sécurité en Afrique à l’Institut d’études internationales de Shanghai (SIIS), cité par BBC Afrique, Pékin poursuit depuis longtemps une politique de non-ingérence dans les affaires intérieures d’un autre Etat. Elle évite donc de proposer des solutions aux conflits, si ce n’est en appelant à des efforts diplomatiques ou politiques de la part d’organisations internationales telles que l’ONU ou l’Union africaine.
Ainsi, dans ses premiers commentaires sur le conflit à l’Est de la RDC, la Chine s’est contentée de critiquer des «forces étrangères» pour le soutien qu’elles apportent aux combattants du M23. Toutefois, au cours des dernières semaines, elle a rompu avec sa pratique habituelle en appelant un chat un chat, en désignant le Rwanda par son nom.
«La Chine réitère son espoir que le Rwanda cesse de soutenir militairement le M23 et retire immédiatement toutes ses forces militaires du territoire de la RDC», a déclaré le chef de la mission diplomatique chinoise à l’ONU en février dernier. Peu après, Pékin a soutenu une résolution du Conseil de sécurité de l’ONU qui appelle carrément les forces de défense rwandaises à « cesser de soutenir le M23 et à se retirer immédiatement du territoire de la RDC, sans conditions préalables.»