Les terres rares, en dépit de leur appellation, ne sont pas aussi rares qu’on pourrait le penser. Cependant, leur production reste concentrée dans quelques pays, et leur extraction est souvent complexe et coûteuse. La Chine, avec sa position dominante sur le marché mondial des terres rares, détient actuellement plus de 70 % de l’offre mondiale. Face à cette domination, les pays occidentaux cherchent activement à diversifier leurs sources d’approvisionnement pour réduire leur dépendance à Pékin, notamment en raison des tensions géopolitiques croissantes. C’est dans ce contexte que l’Afrique se profile comme une alternative stratégique.
Donald Trump est plus déterminé que jamais à s’emparer des réserves de terres rares ukrainiennes. Toutefois, malgré leur nom, les terres rares ne sont pas aussi rares qu’on pourrait le croire. Leur production reste cependant majoritairement concentrée en Chine, qui impose des restrictions sur ses exportations en fonction des tensions commerciales avec les pays occidentaux. Face à cette situation, ces derniers cherchent activement à diminuer leur dépendance à Pékin, tandis que les pays africains possédant des réserves de terres rares se présentent comme des alternatives prometteuses.
Alors que le continent africain joue actuellement un rôle marginal dans la production mondiale de terres rares, plusieurs pays africains disposant de ressources inexploitées commencent à investir massivement dans des projets miniers. Si ces initiatives arrivent à terme dans les délais prévus, l’Afrique pourrait répondre à 9 % de la demande mondiale d’ici 2029, selon un rapport de Benchmark Mineral Intelligence. Cet essor pourrait bien bouleverser l’équilibre mondial du marché des terres rares, qui sont devenues des métaux essentiels dans des secteurs comme l’électronique, les véhicules électriques, l’énergie éolienne, et les technologies de défense.
Les terres rares : Une ressource stratégique pour l’avenir
Les terres rares désignent un groupe de 17 métaux aux propriétés uniques, indispensables à la fabrication de nombreux produits de haute technologie. Ces éléments sont essentiels pour les smartphones, les ordinateurs, les batteries des véhicules électriques, les éoliennes et les équipements militaires. Leur importance est donc capitale dans l’ère technologique actuelle et à venir. La demande pour ces métaux ne cesse d’augmenter à mesure que le monde s’engage dans une transition énergétique et numérique.
Malgré leur nom, leur disponibilité géologique est suffisante, mais elles sont réparties de manière inégale à travers le monde. Le processus d’extraction est souvent long et coûteux, ce qui limite leur production à quelques pays disposant des technologies nécessaires. C’est ici que l’Afrique, avec ses vastes réserves encore sous-exploitées, devient un acteur clé du marché mondial.
La domination chinoise et l’urgence d’une diversification mondiale
Actuellement, la Chine domine largement la production mondiale de terres rares. Ce qui a permis à Pékin de se mettre en position de force sur le marché mondial. Cette domination s’est renforcée au fil des années, en partie grâce à la politique de la Chine visant à limiter ses exportations pour préserver ses ressources et exercer une pression économique et politique sur les autres pays.
Cette situation inquiète particulièrement les États-Unis, l’Europe et d’autres régions du monde qui dépendent largement des importations en provenance de Chine. En raison de la montée des tensions géopolitiques, notamment en raison de la guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine, de nombreuses nations cherchent désormais à diversifier leurs sources d’approvisionnement. Dans cette dynamique, l’Afrique apparaît comme un acteur potentiel majeur.
Les 17 éléments essentiels des terres rares
Ce sont :
- Scandium (Sc)
- Yttrium (Y)
- Lanthane (La)
- Cérium (Ce)
- Praséodyme (Pr)
- Néodyme (Nd)
- Prométhium (Pm)
- Samarium (Sm)
- Europium (Eu)
- Gadolinium (Gd)
- Terbium (Tb)
- Dysprosium (Dy)
- Holmium (Ho)
- Erbium (Er)
- Thulium (Tm)
- Ytterbium (Yb)
- Lutétium (Lu)
L’Afrique : Une alternative stratégique aux acteurs dominants
L’Afrique possède des réserves considérables de terres rares, mais reste encore largement sous-exploitée sur le plan minier. Cependant, une série de projets miniers d’envergure est en développement, avec des pays comme le Malawi, l’Angola, la Tanzanie, l’Ouganda et l’Afrique du Sud qui se positionnent déjà comme des acteurs de poids. Ces projets ont le potentiel de transformer l’Afrique en un fournisseur incontournable sur le marché mondial des terres rares dans les années à venir.
-
L’Angola : Un acteur clé avec la mine de Longonjo
L’Angola se distingue particulièrement grâce au projet de la mine de Longonjo, qui est piloté par le groupe britannique Pensana. Ce projet ambitieux a récemment obtenu un financement de 268 millions de dollars pour démarrer la première phase d’exploitation. Longonjo devrait produire environ 20 000 tonnes de MREC (Mixed Rare Earth Carbonate) par an, un concentré de terres rares utilisé dans la fabrication d’aimants permanents essentiels pour les véhicules électriques et les éoliennes.
L’Angola prévoit d’être capable de fournir 5 % de la production mondiale d’aimants à partir de cette mine, contribuant ainsi à diversifier l’approvisionnement mondial. En plus de son potentiel économique, la mine pourrait créer plusieurs milliers d’emplois directs et indirects, un atout considérable pour l’économie angolaise. Ce projet pourrait non seulement booster l’industrie minière du pays, mais aussi renforcer son influence géopolitique à l’échelle mondiale.
-
Le Malawi : Kangankunde prêt à démarrer en 2026
Le Malawi se prépare également à entrer sur le marché des terres rares avec son projet de mine à Kangankunde. LindianResources, la société en charge du projet, a prévu un investissement initial de 40 millions de dollars pour la mise en production de la mine d’ici 2026. Bien que la production commence plus tard que prévu, avec des retards dans le calendrier, le projet est prometteur et pourrait produire des tonnes de concentré de terres rares pendant plusieurs décennies.
Le projet Kangankunde pourrait jouer un rôle important dans la diversification de l’approvisionnement mondial, notamment en fournissant des terres rares à des marchés qui cherchent à réduire leur dépendance vis-à-vis de la Chine.
-
L’Afrique du Sud : Phalaborwa, un projet rentable en dehors de la Chine
L’Afrique du Sud, avec le projet Phalaborwa, se positionne également comme un acteur important. Le projet est dirigé par Rainbow Rare Earths et est considéré comme l’un des plus rentables au monde en dehors de la Chine. Selon une étude réalisée en 2024, le projet Phalaborwa pourrait produire environ 1 900 tonnes d’oxydes de terres rares à aimants par an sur une durée de 16 ans. Le projet pourrait aussi générer des revenus importants pour l’économie sud-africaine et contribuer à renforcer sa position sur le marché mondial des terres rares.
Malgré quelques défis administratifs et réglementaires, le projet Phalaborwa représente un potentiel significatif et pourrait contribuer à réduire la dépendance mondiale à la Chine dans les années à venir.
-
La Tanzanie : Ngualla, un projet stratégique malgré les tensions
Le projet Ngualla en Tanzanie, géré par Peak Rare Earths, est l’un des projets les plus importants du continent. La mine devrait produire 16 200 tonnes de concentré de terres rares par an, dont des quantités significatives de néodyme et de praséodyme, des métaux essentiels pour l’industrie des véhicules électriques et des éoliennes.
Cependant, le projet Ngualla est confronté à des défis géopolitiques, notamment la participation de la société chinoise Shenghe Resources, ce qui complique les perspectives d’indépendance vis-à-vis de Pékin. Néanmoins, le projet reste une priorité pour le gouvernement tanzanien, qui souhaite en faire un moteur de croissance pour l’économie du pays.
-
L’Ouganda : Makuutu, un projet en quête de financement
L’Ouganda, avec son projet Makuutu, a également un potentiel considérable. Ce projet, géré par Ionic Rare Earths, dispose de réserves prouvées de 172,90 millions de tonnes et d’une durée de vie estimée à 35 ans. La première phase du projet prévoit une production annuelle d’oxydes de terres rares grâce à un investissement initial de 120,80 millions de dollars. Toutefois, le financement reste un défi majeur, et le projet est actuellement en attente de fonds supplémentaires.
Le gouvernement ougandais a déjà accordé un permis minier pour le projet, ce qui constitue un pas important. La réussite de ce projet pourrait faire de l’Ouganda un acteur important dans l’approvisionnement mondial en terres rares.
-
D’autres pays prometteurs : Mozambique et Namibie
En plus des projets majeurs en Angola, Malawi, Tanzanie, Afrique du Sud et Ouganda, plusieurs autres pays africains comme le Mozambique et la Namibie commencent également à développer des projets miniers de terres rares. Ces pays disposent de gisements prometteurs et pourraient rejoindre le cercle des producteurs mondiaux dans les années à venir.
L’Afrique, acteur incontournable du marché des terres rares
In fine, l’Afrique, riche en ressources naturelles, est en passe de devenir un acteur clé dans la production mondiale de terres rares. Avec des projets miniers en développement à travers le continent, le secteur des terres rares africain pourrait voir sa part de marché augmenter de manière significative dans les années à venir. Si ces projets aboutissent comme prévu, l’Afrique pourrait répondre à près de 9 % de la demande mondiale d’ici 2029, un rôle stratégique qui pourrait bien modifier l’équilibre mondial des ressources naturelles et réduire la dépendance des pays occidentaux à la Chine.
Le continent possède un atout majeur : des réserves encore largement inexploitées, et une position géographique stratégique qui pourrait en faire un fournisseur incontournable. Toutefois, le développement de ces projets reste tributaire de nombreux facteurs, notamment l’instabilité politique, les défis liés au financement et la gestion des ressources. Si ces obstacles sont surmontés, l’Afrique pourrait non seulement jouer un rôle crucial dans le secteur des terres rares, mais aussi contribuer de manière significative à la transition énergétique mondiale.
L’Afrique, détenteur de 30 % des réserves mondiales de minéraux critiques
L’Afrique possède environ 30 % des réserves mondiales de minéraux critiques, dont une grande majorité est essentielle pour les technologies renouvelables et les systèmes à faibles émissions de carbone, selon un rapport examiné lors de la 19e Conférence ministérielle africaine sur l’environnement (CMAE), qui s’est tenue à Addis-Abeba.
Ce rapport met en évidence la nécessité d’augmenter la production de minéraux et de métaux tels que le lithium, le graphite et le cobalt, avec une hausse estimée de près de 500 % d’ici 2050 pour répondre à la demande mondiale croissante.
Voici un aperçu des minéraux critiques présents en Afrique, tel que présenté dans le rapport :
Cobalt
Le cobalt est un élément clé des batteries lithium-ion utilisées dans les véhicules électriques et le stockage d’énergie renouvelable. L’Afrique détient environ deux tiers des réserves mondiales de cobalt, la République démocratique du Congo étant le plus grand producteur.
Cuivre
Le cuivre, indispensable pour le câblage et les composants électriques, représente environ 10 % des réserves mondiales en Afrique. La Zambie est le principal producteur de cuivre sur le continent.
Lithium
Le lithium, essentiel pour les batteries lithium-ion des véhicules électriques et le stockage de l’énergie, constitue environ 30 % des réserves mondiales en Afrique. La République démocratique du Congo, le Zimbabwe et le Mali figurent parmi les principaux producteurs.
Terres rares
Les terres rares sont utilisées dans diverses technologies vertes, telles que les éoliennes, les panneaux solaires et les composants de véhicules électriques. Elles sont également cruciales pour des technologies comme les aimants, les capteurs et les lasers. L’Afrique possède environ 15 % des réserves mondiales de terres rares, et la République démocratique du Congo en est le plus grand producteur.
Chrome
Le chrome est un métal résistant à la corrosion, utilisé dans la fabrication de l’acier inoxydable, les pigments et les matériaux réfractaires. L’Afrique détient près de 95 % des réserves mondiales de chrome, l’Afrique du Sud étant le plus grand producteur.
Graphite
Le graphite est essentiel dans la fabrication des batteries lithium-ion pour les véhicules électriques et les systèmes de stockage d’énergie. L’Afrique représente plus d’un cinquième des réserves mondiales de graphite, avec des gisements importants à Madagascar, au Mozambique et en Tanzanie. Ces pays joueront un rôle clé dans le développement des batteries lithium-ion.
Manganèse
L’Afrique détient environ 30 % des réserves mondiales de manganèse, ce qui en fait le principal producteur mondial. Le manganèse est crucial pour plusieurs applications industrielles, notamment la production d’acier et de batteries, et la demande croissante pour ces produits entraînera une hausse de la demande pour ce minéral.
Métaux du groupe du platine
Les métaux du groupe du platine, comprenant le platine, le palladium et le rhodium, sont utilisés comme catalyseurs dans les piles à combustible pour les systèmes énergétiques basés sur l’hydrogène. En 2021, l’Afrique a produit environ 156,3 tonnes métriques de platine, l’Afrique du Sud en représentant la majeure partie (142 tonnes métriques), suivie du Zimbabwe avec environ 15 tonnes métriques.