Oragroup, la maison-mère d’Orabank, est engagée dans une course contre la montre pour redresser sa situation, alors que l’agence de notation Fitch Ratings vient de dégrader sa note pour la deuxième fois en moins d’un an
Pour Fitch, la holding est de fait, en situation de défaut, c’est-à-dire en incapacité d’honorer à temps ses engagements envers ses créanciers. L’agence menace d’abaisser à nouveau son rating. La note d’Orabank est mécaniquement dégradée, car sa solvabilité est alignée sur celle de sa maison-mère.
Le groupe bancaire Oragroup a entamé le 1er novembre dernier, une période de grâce pour honorer le remboursement de deux prêts en euros et en francs CFA, faute de liquidités suffisantes. Une situation critique que l’agence de notation Fitch n’a pas loupé. Alors qu’elle vient d’abaisser la note d’Oragroup de CC à C, l’agence menace de la dégrader à nouveau après le 30 novembre, fin de la période de grâce concédée à la holding bancaire par ses créanciers.
Début d’un défaut de paiement
Fitch justifie cette nouvelle dégradation du rating car elle conclut que la maison-mère d’Orabank est au début d’un défaut de paiement ou d’un processus de défaut. Au moindre no-show sur les prochaines échéances, le couperet pourrait tomber, et le groupe verra sa note dégringoler pour se rapprocher de l’enfer. Oragroup n’aurait d’autre choix que de solliciter une restructuration de sa dette sur des obligations seniors, et sans doute, procéder à une augmentation de capital afin de renforcer ses fonds propres.
Pour Oragroup, ce déficit de liquidités est un signe de fragilité financière structurelle. En octobre dernier, le groupe avait annoncé son intention de lever 273 milliards de FCFA pour renforcer les fonds propres de ses principales filiales de l’Union monétaire ouest-africaine (UMOA), une condition impérative pour se conformer aux exigences du régulateur d’ici la fin de l’année. Plusieurs filiales, dont celles du Togo, du Tchad et de la Guinée, affichent en effet des niveaux de solvabilité inquiétants. L’agence Fitch estime même que le groupe est à la limite des exigences réglementaires en matière de capital.
La stratégie de croissance d’Oragroup mise en cause
La pression s’accentue dans un contexte où Oragroup souffre d’une exposition massive aux risques souverains d’Afrique centrale et de l’Ouest. Le ratio de fonds propres de base (CET1) du groupe est descendu à 2,3% fin 2023, bien en dessous des 7,9% exigés par les régulateurs, tandis que son portefeuille accuse un taux de prêts non performants de 20%. Une situation qui met en péril l’ensemble de sa stratégie de croissance et de stabilité.
Une restructuration des bilans des filiales, notamment en Guinée et en Côte d’Ivoire, pourrait générer jusqu’à 80 milliards de francs CFA supplémentaires, estiment les analystes de Fitch Ratings. Le groupe table également sur une monétisation de ses dettes Tier 2, qui pourrait apporter 17 milliards de francs CFA en capital, ainsi que sur une optimisation de ses actifs pondérés par les risques, pour atténuer la pression sur ses ratios de solvabilité.
Mais la situation reste précaire. Oragroup sait que sans recapitalisation d’ici fin 2024, sa stabilité pourrait être compromise. D’autant plus que la cession des parts d’Emerging Capital Partners (ECP), son actionnaire principal, à Vista Bank, pourtant prévue depuis août 2023, a été retardée sans que l’on n’en sache les raisons. Toutes ces incertitudes relancent les spéculations sur l’avenir du groupe.