La réalité est incontestable — les pays africains ne survivront pas aux tempêtes économiques provoquées par les tarifs douaniers de l’ère Trump, le protectionnisme mondial et les réajustements d’alliances commerciales, à moins de devenir sérieux quant à la construction et à la sécurisation du commerce africain

Trop longtemps, l’Afrique a dépendu de l’aide étrangère et des marchés extérieurs. Cette époque est révolue. Aujourd’hui, nous faisons face à un choix crucial : développer notre commerce ou disparaître.
La fragilité de la dépendance
Depuis des décennies, l’Afrique est considérée comme un continent consommateur, fortement dépendant des importations pour les produits de première nécessité : alimentation, biens manufacturés, technologies… En retour, nous exportons essentiellement des matières premières, souvent non transformées, à bas prix, pour ensuite racheter les produits finis à des prix exorbitants.
Cette structure économique déséquilibrée nous rend vulnérables. Quand les États-Unis, la Chine ou l’Europe modifient leurs politiques commerciales — en augmentant les tarifs douaniers ou en renforçant les barrières commerciales —, nos économies vacillent. Les politiques protectionnistes de l’ère Trump nous rappellent brutalement que le marché mondial n’est pas conçu pour favoriser les économies faibles ou dépendantes.
Nous ne pouvons plus continuer à réagir au coup par coup, à chaque changement externe. Notre survie dépend de notre force intérieure, pas de la sympathie extérieure.
La ZLECAf : le géant endormi
En 2021, la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) a été lancée avec la promesse de créer la plus grande zone de libre-échange au monde en nombre de pays participants. Cet accord pourrait augmenter le commerce intra-africain de plus de 50 % en supprimant les tarifs douaniers et en favorisant la coopération économique.
Mais la mise en œuvre reste désespérément lente.
Les lourdeurs administratives aux frontières, les infrastructures insuffisantes, les divergences politiques et l’absence de mécanismes d’application ralentissent le progrès. Les pays africains continuent de privilégier les accords bilatéraux avec l’Occident ou l’Asie, au détriment des partenariats africains. Si la ZLECAf reste un simple discours politique au lieu de devenir un moteur économique réel, nous passerons à côté de la plus grande opportunité de notre temps.
Ce que l’Afrique doit faire — dès maintenant
Pour survivre et prospérer, l’Afrique doit prendre des mesures urgentes et décisives :
1. Prioriser la production locale
Les gouvernements doivent investir dans les industries locales — agriculture, manufacture, énergie, technologie. La substitution aux importations doit devenir une priorité. Il faut soutenir les PME et les grandes entreprises qui produisent pour la consommation locale et l’exportation.
2. Construire des infrastructures pour le commerce
Routes, chemins de fer, ports, réseaux numériques : tout cela est essentiel. Le commerce ne peut pas prospérer si les déplacements sont coûteux, lents ou risqués. Des partenariats public-privé doivent être mobilisés pour financer les infrastructures transfrontalières.
3. Simplifier les frontières et les douanes
L’Afrique doit moderniser ses procédures douanières. Les retards aux frontières et la corruption alourdissent les coûts du commerce. Un système douanier unifié et numérique est nécessaire à l’échelle du continent.
4. Encourager l’investissement africain
Les banques africaines, les investisseurs locaux et la diaspora doivent être incités à investir dans des projets africains. Nous ne pouvons pas compter uniquement sur les investissements étrangers. Le capital est là — il faut maintenant la volonté, la stratégie et le leadership pour l’utiliser.
5. Sensibiliser et éduquer la population
La réforme économique doit inclure les citoyens. Ils doivent comprendre l’importance de consommer africain, de soutenir les entreprises locales et d’investir dans leurs propres économies. Le commerce ne doit pas rester entre les mains d’une élite — il concerne tout le monde.
L’unité ou la fin
L’avenir du continent ne dépend pas des aides ni des faveurs diplomatiques, mais de l’unité africaine et de la coopération économique. Si nous ne construisons pas un écosystème commercial solide à l’intérieur de l’Afrique, nous resterons à la merci des crises extérieures.
Le temps du débat est passé. Le moment est venu d’agir. Il ne s’agit plus de stratégie — il s’agit de survie.
*Willy Lukang
Fondateur & PDG
Easy Cargo Freight International