Donald Trump suspend l’aide militaire américaine à l’Ukraine jusqu’à ce que le président ukrainien montre de la « bonne volonté » pour négocier avec Vladimir Poutine. Un geste d’une brutalité sans précédent qui va consterner les Européens qui tentaient une médiation
Donald Trump ne fait pas de cadeaux. Les Européens qui ont multiplié depuis vendredi les efforts pour recoller les morceaux entre Washington et le président ukrainien, se sont heurtés à un mur. Un milliard de dollars d’équipement militaire déjà approuvés pour l’Ukraine ont été gelés hier, un geste sans précédent à cette ampleur.
Le but est de faire plier Volodymyr Zelensky, voire d’obtenir son départ comme le demandent certains ténors républicains. Officiellement, l’aide sera débloquée si le président ukrainien montre sa «bonne volonté» pour négocier avec la Russie de Vladimir Poutine, aux conditions dictées par Donald Trump.
C’est d’une brutalité diplomatique exceptionnelle avec un pays censé être sinon un allié, au moins un ami ; en guerre de surcroit contre une puissance qui a envahi son territoire. Mais pour Trump, Zelensky lui a manqué de respect dans le bureau ovale, et il doit le payer en se soumettant : qu’il accepte de s’humilier et le gel de l’aide sera levé.
Les Européens qui étaient réunis à quelques uns dimanche à Londres, et se retrouvent à 27 jeudi à Bruxelles, seront consternés. Le divorce transatlantique à l’œuvre depuis le 20 janvier vient de franchir un palier décisif.
Le président des États-Unis veut à tout prix un accord avec Vladimir Poutine, à la fois pour se couronner « homme de paix », et pour permettre au business américain de reprendre le chemin de Moscou. Il a multiplié les gestes en direction de Poutine, comme l’arrêt hier des cyberactions offensives contre la Russie, ou la dissolution des services chargés de surveiller la désinformation russe.
Tous ceux qui se mettront sur le chemin de Donald Trump seront broyés. Il n’a de respect que pour les « empires », pas pour les « petits » pays qui trouveront leur place dans des sphères d’influence.
Le ministre ukrainien des affaires étrangères disait récemment qu’il ne fallait pas de « nouveau Yalta », une allusion au partage du monde en sphères d’influence à la fin de la Seconde guerre mondiale ; ses pires craintes se sont confirmées depuis.
Il y a un parallèle intéressant avec ce qui se passe vis-à-vis d’Israël. On apprenait hier que Marco Rubio, le chef de la diplomatie américaine, avait accéléré l’approbation de 4 milliards de dollars d’aide militaire américaine à Israël. Et ce, à un moment où le cessez-le-feu menace de s’écrouler dans la bande de Gaza d’un jour à l’autre. Israël a déjà coupé illégalement l’entrée de l’aide humanitaire au territoire palestinien, avec l’accord de l’administration américaine.
Joe Biden avait suspendu certaines livraisons de bombes particulièrement meurtrières à Israël à la fin de son mandat, ce que Donald Trump s’est empressé de rétablir. Mais à aucun moment, même quand il était en désaccord total avec Benyamin Netanyahou, Joe Biden n’a suspendu toute l’aide à Israël.
L’Ukraine et Israël sont deux dossiers très différents, évidemment, mais la brutalité de l’administration envers le premier, et la complaisance envers le second n’a qu’une seule explication : le rapport personnel de Donald Trump au dirigeant concerné, détestation dans le cas de Zelensky peu malléable ; soutien inconditionnel à Netanyahou qui sait parler au Narcisse de la Maison Blanche.
A méditer en ces temps de bouleversement stratégique total, et inquiétant pour ceux qui s’accrochent au droit et à la fidélité aux alliances.
Source : Radio France