C’est le FMI qui émet le warning. Avec un régime d’imposition très généreux, l’Ile Maurice est en effet une terre clémente pour de très nombreux fonds d’investissement et des fortunes qui veulent «optimiser» leurs charges fiscales. Maurice est un refuge pour tous ceux qui pratiquent l’évasion fiscale. D’où l’accueil des véhicules qui portent les investissements de groupes miniers dans les pays africains, avec un risque très élevé d’évasion de la matière imposable, s’alarme le Fonds monétaire international dans un rapport paru lundi 15 juillet
Ce n’est pas un hasard si en République démocratique du Congo (RDC), un géant minier du continent, Maurice est à l’origine de 63% des investissements directs étrangers dans le secteur des ressources extractives. Pourtant, le top 10 des multinationales qui concentrent 67% des exportations de cuivre et 80% des ventes de cobalt ont leurs sièges sociaux en Chine, au Canada, en Suisse, au Kazakhstan ou encore au Royaume-Uni. Cherchez l’erreur.
Aussi, les capacités d’investissement de l’île sont exceptionnelles. Selon sa Banque centrale, le stock total des investissements étrangers effectués par des sociétés domiciliées à Maurice s’élevait à 312,5 milliards de dollars en 2022, soit plus de 24 fois son PIB qui s’élevait à 13 milliards de dollars la même année, d’après la Banque mondiale.
Un régime d’imposition qui incite à investir
Le défi posé par l’île réside dans la nature de son régime d’imposition particulièrement généreux comparativement à ceux de nombreux pays africains. Sa législation fiscale prévoit notamment un impôt sur les sociétés de 15% contre une moyenne mondiale de 25%. De plus, les activités de ports francs, utilisées principalement dans le secteur extractif pour stocker les ressources et spéculer sur la hausse des prix, y sont les bienvenues. Celles-ci permettent de générer de super profits non taxés par le pays d’origine des minerais et soumis à une taxe de 3% à Maurice.
Les pays tentent de se protéger contre ce risque d’évasion fiscale. La RDC a adopté des législations pour contrer les transferts de bénéfices vers les paradis fiscaux. «L’efficacité de ces initiatives est entravée par la capacité limitée de l’administration fiscale à auditer des transactions complexes, ce qui suggère que le renforcement des capacités d’audit est crucial pour traiter de manière exhaustive les prix de transfert et le transfert des bénéfices», explique le FMI.
Justice fiscale
Le débat sur la capacité des pays à mobiliser des ressources domestiques est crucial. Il va désormais au-delà du principe de justice fiscale, défendu pour la première fois en 2015 par le rapport du panel de haut niveau sur les flux financiers illicites dirigé par l’ex-président sud-africain Thabo Mbeki. Dans plusieurs documents successifs, il est reconnu par les Nations Unies que l’évasion fiscale prive les pays, surtout les plus pauvres, des moyens nécessaires pour satisfaire les droits fondamentaux de leurs citoyens.
En RDC, malgré une amélioration des recettes fiscales, l’écart entre ce qui est collecté et ce qui devrait l’être reste important, surtout dans le secteur extractif, selon les calculs du FMI. Dans ce contexte, le riche sous-sol du pays conduit à une croissance économique qui a encore des marges de progression pour être plus inclusive. Alors que la valeur créée dans le secteur minier a progressé de 11,3% en moyenne entre 2002 et 2023, le PIB par habitant (649 dollars) de l’année 2023, bien que multiplié par trois au cours des 10 dernières années, reste inférieur à la moyenne de l’Afrique subsaharienne (1.637 dollars).