Beaucoup reprochent aux États-Unis d’avoir négligé le marché congolais, laissant le champ libre aux investisseurs indiens, chinois et libanais qui dominent aujourd’hui près de 80 % de l’économie nationale. Tandis que les

Fondateur & PDG, Easy Cargo Freight International
Américains insistent sur la gouvernance, la transparence et le respect des règles, ces autres acteurs s’adaptent rapidement aux réalités locales, souvent sans scrupules.

Mais ce reproche, bien qu’alimenté par une frustration légitime, reflète aussi une incompréhension de la logique d’investissement durable. Il est dangereux de croire que l’État congolais n’a aucun rôle à jouer et que le marché se régulera de lui-même grâce aux capitaux étrangers. Sans un État fort et structurant, le marché devient une jungle où règnent la corruption, l’anarchie économique, l’exploitation, et l’insécurité juridique.
Absence d’éthique
En effet, de nombreux investisseurs étrangers — notamment certains groupes chinois, indiens et libanais — ne respectent ni les droits des travailleurs congolais, ni les normes élémentaires de qualité. Ils imposent des conditions de travail inhumaines, paient des salaires dérisoires, abusent des employés, et introduisent sur le marché des produits de basse qualité, parfois dangereux pour la santé de la population. Le silence ou l’inaction de l’État face à ces dérives est une trahison des intérêts du peuple.
Pire encore, en l’absence de contrôle efficace des flux financiers, nos territoires deviennent des havres pour le blanchiment d’argent. Certains réseaux liés à des entités comme le Hezbollah ou d’autres groupes extrémistes exploitent la désorganisation de nos États pour dissimuler des activités criminelles sous couverture de faux commerces. Cela met non seulement en danger notre économie, mais compromet aussi notre sécurité nationale.
Il faut avoir le courage de dire que, même si ces investisseurs peuvent représenter un « mal nécessaire » dans notre situation économique actuelle, ils ne doivent pas agir sans règles. Servir le peuple congolais ne doit jamais se faire au prix de sa dignité, de sa santé ou de sa sécurité. Il est temps d’instaurer un véritable équilibre : protéger nos citoyens, exiger des standards élevés, et surtout valoriser et financer le capital congolais.
Le capital étranger ne justifie pas tous les manquements
La souveraineté économique commence par la promotion de l’entrepreneuriat national. Notre pays doit investir dans ses propres fils et filles, leur offrir un accès équitable au financement, à la formation, aux marchés, et aux technologies. Aucun développement durable ne peut reposer uniquement sur l’extérieur.
Mais cela ne veut pas dire fermer la porte aux partenaires étrangers. L’État congolais doit attirer des investissements stratégiques et responsables — ceux qui construisent nos infrastructures, créent des emplois décents, assurent le transfert de compétences, et respectent les règles du jeu. Il faut plus que des fonds : il faut une vision, une volonté politique et une capacité institutionnelle.
Appel à l’action politique
Le temps des discours est révolu. Place à l’action.
Nos autorités — du Parlement au Gouvernement, en passant par les gouverneurs de province — doivent :
Adopter une loi-cadre sur l’investissement responsable, fondée sur la transparence, l’intérêt national et le respect des droits humains ;
Renforcer les mécanismes de contrôle des flux financiers pour prévenir le blanchiment d’argent et les activités criminelles ;
Renforcer les capacités de la CENAREF (Cellule nationale des renseignements financiers) et vulgariser sa mission auprès des banques, entreprises, administrations et citoyens, afin que chacun comprenne son rôle dans la lutte contre les crimes financiers et la protection de notre économie ;
Mettre en place un système national de certification des produits, pour protéger les consommateurs contre les marchandises dangereuses ou de mauvaise qualité ;
Créer des fonds souverains d’investissement locaux, dédiés au développement des PME congolaises et à l’innovation ;
Initier des partenariats équilibrés avec des pays comme les États-Unis, qui apportent une expertise de haut niveau et des normes rigoureuses, sans logique d’exploitation.
Il ne s’agit plus de choisir entre gouvernance et développement économique. Il faut exiger les deux : un progrès avec dignité. Notre avenir ne peut plus être décidé par ceux qui n’en subissent pas les conséquences.
Agir maintenant, c’est garantir une RDC souveraine, compétitive et respectée.
*Willy Lukanga
Fondateur & CEO, Easy Cargo Freight International