Lomé a été, le 20 octobre 2023, le temps d’un forum, le siège «non permanent», du Conseil Paix et Sécurité de l’Union africaine (UA). C’est le gouvernement togolais qui a pris l’initiative, avec le soutien de l’UA et de l’ONU, de réunir les ministres des Affaires étrangères de dix pays dont ceux du Sahel à savoir le Mali, le Burkina Faso et le Niger où les questions de paix et de sécurité constituent l’actualité de tous les jours.
La Première ministre du Togo, Victoire Tomegah-Dogbé, qui avait présidé, le samedi 21 octobre 2023, à la cérémonie d’ouverture de la première édition de ce forum sur la Paix et la Sécurité en Afrique n’a pas manqué d’en souligner l’importance dans un contexte régionale et international trouble. Il y avait certes les transitions politiques qui rythment la vie de plusieurs pays de la sous-région (Burkina Faso, Gabon, Guinée, Mali, Niger, Tchad) mais également les guerres civiles (Soudan, Libye) ainsi que le conflit israélo-palestinien dont l’évolution à Gaza divisent les Africains.
Si les pays «en transition» avaient accepté de venir à Lomé pour faire une sorte d’état des lieux de leur situation politique et tenter de trouver un semblant de compromis avec l’UA et la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) qui avait brandi la menace d’une intervention militaire pour réinstaurer l’ordre démocratique, les organisations sous-régionales, Adeoye Bankole, Commissaire de l’Union africaine pour la Paix et la Sécurité a bien précisé l’objectif : «La rencontre de Lomé sur les transitions politiques doit être une rencontre de solution.» Une intransigeance de l’UA et de la Cedeao qui bute sur l’entêtement des juntes au pouvoir dans les pays en crise, unis pour le meilleur et pour le pire, de ne pas mener leurs transitions au pas de charge. Car si au Mali, on évoque des contraintes «techniques» ayant entravé le bon déroulement transitoire d’un processus qui dure depuis le 20 juin 2020, au Burkina Faso, le capitaine Ibrahim Traoré qui préside aux destinées du pays depuis plus d’un an, a déclaré récemment que les élections «ne sont pas une priorité», que ce qui compte c’est la sécurité ! Une manière de dire : «j’y suis, j’y reste?»
Le choix du partenaire
Evoquer les relations de l’Afrique, et particulièrement le «changement de partenaire» (sans jeu de mots), poussant la France dehors pour introduire la Russie, a également été un sujet à débat lors du Forum de Lomé. Si certains pays s’assument – et assument – leur nouveau positionnement géostratégique faisant de Moscou leur nouvelle «Mecque», d’autres estiment par contre que
Participant, ici, à la rencontre des ministres des Affaires étrangères des pays invités au Forum, Certains intervenants ont saisi l’occasion pour mettre les pieds dans le plat. Ainsi, abandonner un partenaire pour un autre n’est pas la solution. En clair, «tourner le dos à la France pour se jeter dans les bras de la Russie ne règle pas les problèmes mais les déplace.»
«La solution aux crises politiques doit être endogène», ont déclaré plusieurs autres responsables de pays dirigés par des putschistes qui ont pointé la mauvaise gouvernance comme déclencheur de ces putschs, une pierre dans le jardin des institutions sous-régionales comme la Cédéao, accusée souvent de faire deux poids-deux mesures face à des situations identiques.
Le sujet de la durée des transitions
Puisque la communauté internationale (ONU), l’Union africaine et la Cedeao n’ont pas réussi à réinstaller certains présidents déchus, en brandissant la menace des sanctions économiques, et même de l’intervention militaire, il était évident que ce qui préoccupe maintenant c’est de pousser les putschistes à accélérer la cadence pour un retour rapide à la démocratie. La présence à Lomé des délégations du Burkina Faso, du Mali et du Niger était, déjà, un signe annonciateur que ce sujet délicat allait être au menu des discussions entre ministres des Affaires étrangères, représentants de l’ONU et de l’Union africaine ainsi que d’une dizaine d’ONG invitées à ce forum de trois jours. On oublie cependant que le thème choisi pour le Forum Paix et Sécurité 2023 : « Comment gérer les transitions politiques » en Afrique peut être vu comme une acceptation des coups d’Etat en tant que réalité indéniable d’un continent à paradoxes.