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Entretien avec Aziz Abelherazem, expert international en gestion des déchets et des ressources

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Article du dossier Gestion des déchets

Déchets organiques : Comment la peste porcine a causé un désastre ?

Qui pouvait se douter qu’une simple peste porcine allait causer un véritable problème de salubrité en Egypte ? C’est pourtant arrivé ! Pays qui, en matière de gestion des déchets solides, commence à accumuler une riche expérience.
Aziz Abelherazem, expert allemand, passe en revue les difficultés rencontrées dans le pays le plus peuplé d’Afrique du Nord.

 

AFRIMAG : En Egypte, notamment le Caire, la collecte des déchets a été confiée à des entreprises, mais les rues restent jonchées d’ordures. Et ce phénomène dure depuis plus d’une décennie. Comment l’expliquez-vous ?

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Aziz Abelherazem, expert international en gestion des déchets et des ressources

Aziz Abelherazem : Oh oui, ce phénomène a de nombreuses raisons, dont l’un d’eux est le contexte historique : en 2009, avant l’apparition de la grippe porcine, tous les intermédiaires et zabbalines travaillaient comme sous-traitant chez des sociétés étrangères en charge des service de collecte et nettoyage des rues ou chez des sociétés locales privées (gestion des déchets des hôtels, hôpitaux, etc.). Les déchets collectés étaient transportés vers leurs communautés pour le tri, en particulier à Manshit Naser. Les déchets organiques qui constituaient la grande proportion générée étaient utilisés comme nourriture des procs, donc pas de rejets ou presque pas. Et par conséquent on voyait des rues plus propres.

Après 2009, le gouvernement égyptien a décidé d’éliminer tous les porcs. En conséquence, le zabbalines, qui normalement devraient transporter les rejets (déchets restants après le tri des matières valorisables) ne le faisaient pas et il n’y avait plus de porcs pour éliminer les matières organiques (environ 60% des déchets collectés).

Ce qui a fait des rues des dépotoirs pour ces déchets «non valorisables». Par ailleurs, des problèmes contractuels avec les entreprises étrangères ont été rencontrés, en raison des questions financières et de l’incapacité des gouvernorats à régler les factures des entreprises étrangères. Cela a fini par la résiliation de ces contrats.

Comment expliquez-vous le partenariat entre entreprises étrangères et les zabbalines (les chiffonniers) dans le nettoyage des villes égyptiennes ? A-t-il donné des résultats?

Très bonne question ! De mon point de vue, les résultats étaient satisfaisants tant que les conditions le permettaient.

Au début de 2001 (lors de la venue d’entreprises étrangères au Caire), il existait une relation sous-contractuelle claire entre les zabbalines et ces entreprises. Les zabbalines étaient responsables de la collecte des déchets primaires et de leur transport vers leurs communautés respectives pour le tri et leur élimination (in situ en alimentant les porcs grâce aux déchets organiques restants).

Les zabbalines recevaient de la part de la société une livre égyptienne par unité de ménage (ce qui arrangeait la société étrangère) et des mensualités des ménages pour l’enlèvement de leurs déchets.

Cette clause financière convenait à la fois aux zabbalines et aux sociétés étrangères jusqu’en 2009, avec l’apparition de la grippe porcine.

Lorsque les déchets n’étaient plus éliminés in situ (par les porcs), les coûts de transports sont apparus et la rémunération n’était plus suffisante pour recouvrir les coûts.

Le concept de partenariat n’était plus fondé sur une situation gagnant-gagnant, et il n’y avait pas d’intérêts communs entre les deux partenaires.

Pourquoi les unités industrielles de traitement des ordures ménagères par méthanisation ne fonctionnent pas en Egypte, d’ailleurs pas plus que dans aucun pays en développement jusqu’à ce jour, alors qu’il en existe plusieurs dizaines en Europe ?

En Égypte, le traitement des matières organiques par digestion aérobie est la méthode la plus connue pour produire le compost. Il existe des exemples de réussite en matière de production de méthane par le biais du biogaz, en particulier dans les zones rurales, notamment les projets de production de méthane
à partir de boues d’épuration. Ce type de projet doit contribuer à façonner la réglementation et le cadre institutionnel au niveau national. Actuellement, le gouvernement envisage d’adopter un décret encadrant les redevances concernant les technologies d’économie d’énergie et de production d’électricité au coût moyen de 1,25 livre égyptienne par kwh.

Si, dans les pays développés, la gestion des déchets fonctionne, c’est qu’ils s’inspirent les uns des autres. Car les habitudes de consommation sont proches. De même, les pays du Sud peuvent-ils s’inspirer de ceux qui ont réussi ?

En Egypte, il existe des différences d’habitudes et de types de consommation. Il sera donc nécessaire de définir une vision stratégique compatible avec ces habitudes, d’assurer le recouvrement des coûts de gestion des déchets, de former le personnel et cadres indispensables pour la gestion des déchets et renforcer les capacités institutionnelles.

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