Dans un récent article sur la ZLECAf, nous avons mis en exergue le rôle d’un système logistique efficace pour réduire les coûts commerciaux et faciliter le commerce intra-régional. Des infrastructures de transport performantes de classe mondiale, comprenant des ports modernes, des routes de qualité et des réseaux numériques fiables, sont nécessaires pour assurer un flux fluide des biens et des services.
Par Prof El Hassane HZAINE
D’ailleurs comme ça été prouvé statistiquement, l’Indice de performance logistique (LPI) et la facilitation des échanges commerciaux sont fortement corrélés avec l’Indice africain d’intégration régionale multidimensionnelle (AMRII), démontrant l’importance d’une logistique efficace et de la facilitation des échanges pour l’intégration économique. Le LPI évalue non seulement les infrastructures logistiques, mais aussi la connectivité maritime. Par exemple, le port de Tanger Med au Maroc offre des liaisons directes vers plus de 180 ports à travers le monde, améliorant ainsi l’accès aux marchés internationaux.

Selon les rapports de la BAD, de nombreux pays africains performent bien en termes d’intégration commerciale mais ils sont moins performants en termes d’intégration infrastructurelle et productive, il existe de grandes différences dans la qualité et le développement des infrastructures entre les pays, ce qui suggère un besoin de développement des infrastructures pour renforcer davantage l’intégration globale. Seuls quelques pays africains ont des scores équilibrés dans toutes les dimensions de l’intégration en Afrique, par exemple le Maroc et l’Afrique du Sud performent bien en termes d’intégration macroéconomique, d’intégration productive, de commerce et d’intégration infrastructurelle.
D’ailleurs, les scénarios les plus prometteurs de l’impact du libre-échange sur l’intégration régionale, en termes d’expansion du commerce création d’emplois et la croissance des revenus, incluent non seulement le démantèlement tarifaire mais aussi la facilitation des échanges ; l’amélioration des infrastructures et de la logistique est cruciale et peut dépasser les gains engendrés par les baisses tarifaires. (Banque mondiale, CNUCED, Gtap modelling de Purdue University).
Le verdict de la Banque mondiale (2020) est sans appel ; pour réaliser des gains de revenus significatifs en Afrique, estimés à 292 milliards de dollars, il faudra mettre l’accent sur la facilitation des échanges.
Les Défis du Développement des Corridors de Transport en Afrique
Le développement des corridors de transport en Afrique est entravé par des défis complexes et multidimensionnels. Ces obstacles, qui touchent aux aspects historiques, structurels, financiers et politiques, freinent l’intégration régionale et limitent le potentiel des infrastructures.
- Un Héritage Colonial et une Fragmentation Structurelle
Les infrastructures africaines de transport portent encore les traces de l’ère coloniale, où leur conception était orientée vers l’extraction des ressources naturelles plutôt que le développement des échanges intra-régionaux. Les frontières héritées de cette période ont morcelé les réseaux, créant des terminaux isolés qui limitent la connectivité entre pays voisins. Contrairement à l’Europe, qui privilégie une densification des réseaux de transport, l’approche africaine se concentre sur la connexité, visant à relier des points isolés sans véritable logique de réseau intégré.
- Une Connexité versus Connectivité
Le choix stratégique de l’Afrique de se focaliser sur la connexité, soit l’achèvement de liaisons spécifiques, s’oppose à la logique européenne de connectivité, qui vise à multiplier les interconnexions dans un réseau structuré. Cette approche limite la création de systèmes de transport cohérents et freine l’émergence d’une véritable infrastructure régionale.
- Une Dépendance Accrue au Financement Extérieur
Le financement des projets d’infrastructure en Afrique repose largement sur des investisseurs étrangers (Chine Japon France Turquie etc..) et des institutions financières internationales comme la BAD. Cette dépendance expose les projets à des contraintes budgétaires et au risque d’endettement accru. De plus, les priorités financières de la BAD, bien qu’étant un acteur clé dans le Programme de développement des infrastructures en Afrique (PIDA), n’est pas une institution de l’Union africaine, sont souvent orientées par des impératifs de rentabilité et de gestion des risques, influençant ainsi directement les choix de projets, parfois au détriment des besoins régionaux.
- Des Gouvernances et des Coordinations Fragmentées
La multitude d’acteurs impliqués – gouvernements, communautés économiques régionales, bailleurs de fonds, et entreprises privées – rend la coordination particulièrement difficile. Les conflits d’intérêts, les priorités divergentes et les interprétations variées du concept de corridor – parfois réduit à une simple route – compliquent la mise en œuvre de projets intégrés. Cette complexité contraste avec les structures de gouvernance plus centralisées et efficaces observées en Europe.
- Un Manque de Maintenance et une Dégradation des Infrastructures
Le sous-entretien des infrastructures existantes constitue un défi majeur. L’état dégradé des routes, les embouteillages et les problèmes de sécurité augmentent les coûts de transport et découragent les activités commerciales. Cette négligence est aggravée par une priorité excessive accordée à la construction de nouvelles infrastructures, au détriment de la réhabilitation et de la maintenance des réseaux existants.
- Une Faible Intégration Commerciale Intra-Africaine
Les échanges commerciaux entre pays africains restent limités, rendant les investissements dans les corridors de transport moins rentables. Ces infrastructures sont davantage utilisées pour soutenir le commerce international que pour stimuler le commerce intra-africain, réduisant ainsi leur impact sur l’intégration régionale.
- Une Conception Fragmentée des Corridors de Transport
La notion de corridor de transport manque d’uniformité en Afrique. Selon les acteurs, elle est parfois limitée à une simple infrastructure routière, sans prise en compte des dimensions multimodales ou des objectifs de développement régional, ce qui réduit son efficacité. (Transport Corridors in Africa, Hugh Lamarque and Paul Nugent 2022).
Utilité d’un nouveau corridor de développement reliant l’Océan Atlantique au Sahel
Les pays africains, bien que relativement performants en termes d’intégration commerciale, accusent un retard en matière d’intégration infrastructurelle. Le développement d’infrastructures de transport efficaces est crucial pour réduire les coûts commerciaux et faciliter le commerce intrarégional.
Le Réseau d’infrastructures de transport régional en Afrique (ARTIN), qui inclut la Route Transafricaine (TAH) qui traverse l’Algérie, projet mort-né initié notamment par l’Algérie la CNUCED en partenariat avec la BID, et 40 corridors clés, sert de référence pour les projets d’infrastructures du Programme de développement des infrastructures en Afrique (PIDA) de l’UA (Transport Corridors in Africa, op cit).
Cependant, l’ARTIN fait face à des défis de mise en œuvre et de financement. Le financement dépend fortement des investisseurs étrangers (Chine Japon France etc..), avec des budgets publics souvent insuffisants. De plus, la multiplicité des acteurs et des conflits d’intérêts entrave la coordination.
En outre, les corridors sont souvent axés sur la « connexité » et le colmatage des brèches du réseau (achèvement des liens manquants) plutôt que sur la « connectivité » (multiplication des liens au sein d’un réseau), ce qui limite l’intégration régionale et une approche multimodale.
Le mappage des corridors planifiés par l’Afrique, laisse apparaitre une certaine marginalité de la région enclavée du Sahel, il est grand temps de lancer un nouveau corridor stratégique N’Djamena-Dakhla qui vise non seulement à couvrir en corridors une zone négligée mais surtout il vise à intégrer les pays enclavés du Sahel aux réseaux commerciaux internationaux en leur offrant un accès à l’océan Atlantique via des routes alternatives de nature à réduire le coût des transactions commerciales et doper la compétitivité des exportations.
Contraintes structurelles des pays enclavés du Sahel
Une analyse des scores de l’indice de performance logistique (LPI) et des coûts commerciaux des pays d’Afrique de l’Ouest révèle des disparités marquées entre les pays côtiers et les pays enclavés.
Les pays côtiers d’Afrique de l’Ouest affichent de meilleurs scores à l’Indice de performance logistique (LPI) grâce à leur accès direct aux ports, contrairement aux pays enclavés qui font face à des défis logistiques importants.

Les pays côtiers comme le Sénégal, le Ghana, le Nigeria et la Côte d’Ivoire, affichent des scores LPI plus élevés, entre 2,5 et 2,7.
Les pays enclavés, tels que le Mali, le Burkina Faso, le Niger et le Tchad, présentent des scores légèrement inférieurs, entre 2,3 et 2,6.
Les coûts commerciaux peuvent atteindre jusqu’à 3 800 USD par conteneur pour les pays enclavés, contre 1 500 à 1 800 USD pour les pays côtiers.
Dégâts collatéraux du retrait des pays du Sahel de la CEDEAO
Les pays du Sahel souffrent non seulement d’isolement géographique, mais aussi économique. Ils dépendent souvent des pays côtiers pour l’accès aux marchés internationaux, et sont donc vulnérables aux perturbations des voies de transport.
Nos prévisions, dans un article il y a un an, sur l’impact du retrait des trois pays du Sahel de la CEDEAO commencent à se préciser chiffres à l’appui ; en effet dans un rapport récent, l’AFP a mentionné qu’en 2022 lorsque les sanctions de la CEDEAO avaient atteint leur paroxysme contre le Mali, le coût du fret malien transitant par Conakry a augmenté de 243 % par rapport à l’année précédente.
Abondant dans le même sens une autre étude de l’OCDE, publiée en décembre 2024, souligne que le détournement des routes de transit « a entraîné une augmentation de plus de 100 % des coûts logistiques par rapport à l’itinéraire d’avant la crise, ce qui se répercute sur les prix des denrées alimentaires » et d’ajouter que les routes commerciales alternatives s’accompagnent de nouveaux défis notamment la traversée de régions instables en proie à des attaques des groupes djihadistes et criminels (à en juger par le nombre rapts de camionneurs dans certains itinéraires). (Afrimag 27/01/ 2025).
Bien qu’ils soient dans des conditions légèrement meilleures, les pays côtiers ne doivent pas pour autant dormir sur leurs lauriers, ils restent en dessous de la moyenne mondiale de l’indice de performance logistique (LPI inférieur à 3,0), révélant un besoin commun d’amélioration des infrastructures et de modernisation des ports africains qui n’ont pas pu, d’ailleurs, bénéficier de la hausse de trafic maritime via le Cap suite à l’insécurité du détroit de Bab Al Mandab et la recrudescence des attaques des navires.
Le détournement des flottes de la mer Rouge et du canal de Suez n’a, à quelques exceptions près ( Tanger Med en figure de proue), produit aucun impact significatif sur les activités et les volumes des ports africains, y compris les grands hubs tels que Lomé (Togo), Pointe-Noire (République démocratique du Congo), Abidjan (Côte d’Ivoire), Durban (Afrique du Sud) et Dar-es-Salaam (Tanzanie), qui n’ont enregistré aucune augmentation notable des volumes traités. ( Ronan Kerbiriou, ingénieur d’études à l’Université du Havre et doctorant au CNAM-Paris Mars 2024).
Cette situation souligne, si besoin ait, l’importance d’investir dans les corridors de transport et d’améliorer la coopération régionale pour réduire les coûts et améliorer l’efficacité logistique.
L’initiative historique du Roi Mohammed VI d’ouvrir une nouvelle voie vers l’océan pour le Sahel
En novembre 2023 S.M le Roi Mohammed VI a annoncé, dans un discours à la nation que le Royaume du Maroc va lancer une nouvelle initiative internationale visant à accorder aux pays du Sahel un accès à l’océan Atlantique afin de les intégrer aux réseaux et routes commerciales internationales.
En ouvrant la voie de l’atlantique aux pays du Sahel non seulement le Maroc retrouve une tradition séculaire de commerce et d’échanges culturels et religieux mais aussi il se conforme d’une manière volontaire à la légalité internationale, en observant les dispositions pertinentes de la convention de Barcelone de 1921 sur la liberté du transit, l’article V du GATT/OMC sur la liberté de transit et surtout la « Convention de l’ONU relative au commerce de transit des États sans littoral » adoptée par l’ONU en février 1965, qui ont appelé à ouvrir des corridors au profit des pays enclavés pour accéder à la mer et leur faciliter l’exercice de la liberté et le droit au transit.
Dans cette optique, le Royaume du Maroc a organisé une réunion de coordination ministérielle sur l’initiative de S.M. le Roi pour améliorer l’accès à l’océan Atlantique pour les pays du Sahel les 22 et 23 décembre à Marrakech 2023, avec la participation du Mali, du Niger, du Burkina Faso et du Tchad ; la Mauritanie rejoindra également cette importante initiative à un stade ultérieur. Tout en exprimant leur gratitude à l’offre du Maroc de « mettre ses infrastructures routières, portuaires et ferroviaires à disposition des pays du Sahel pour renforcer leur participation au commerce international », les participants ont convenu de mettre en place des groupes de travail dans chaque pays pour promouvoir la mise en œuvre de l’initiative.
Le corridor N’Djamena-Dakhla, Un Boom Économique en Perspective
Ce corridor est un projet ambitieux qui se positionne au de la route commerciale comme un catalyseur de développement économique, d’intégration régionale et de transformation géopolitique pour les pays enclavés du Sahel.
L’idéal est de ne pas se limiter au transit des marchandises et viser dès le départ la mise en place d’un corridor de développement économique intégré (CDEI) qui vise à transformer un simple axe de transport (routier, ferroviaire, maritime, ou une combinaison de ces modes) en un moteur de croissance économique et de développement social, en intégrant des infrastructures, des services, et des politiques.
Dans la pratique il y a plusieurs types de corridors allant du plus basique le corridor routier, axé sur l’infrastructure physique, en passant par le corridor de transport, intégrant divers modes de transport et des services logistiques, jusqu’au corridor économique, un véritable outil de développement et d’intégration régionale.
Les corridors sont dynamiques ; ils se transforment au fur et à mesure de leur développement ; un simple corridor routier peut ainsi devenir un corridor de transport, puis logistique, et finalement économique. Cette évolution n’est pas automatique, elle nécessite une gestion rigoureuse et la mise en place de politiques publiques adaptées, ainsi qu’une coordination efficace entre les acteurs.
Le tracé doit relier des « nœuds d’extrémité », qui sont des zones où l’offre et la demande se rencontrent pour créer une dynamique commerciale ; ces nœuds peuvent être des villes, des ports, des zones industrielles ou agricoles, qui agissent comme des points de départ et d’arrivée pour les flux de marchandises et de personnes. (Albie Hope& John Cox Development Corridors, 2015)
Cette transformation va au-delà de l’amélioration des routes et inclut la mise en place d’une gamme complète d’activités et d’infrastructures pour stimuler le commerce et l’activité économique sur son passage.

En somme, un corridor de développement économique intégré est bien plus qu’une simple route. C’est un ensemble complexe d’infrastructures, de services et de politiques, coordonné par un mécanisme de gestion, dont l’objectif est de stimuler le développement économique et l’intégration régionale de manière durable.

Impact transformateur du Port Atlantique de Dakhla et du Corridor
Le Port Atlantique de Dakhla, avec un investissement d’environ 1,2 milliard de dollars, est un hub logistique pour l’Afrique de l’Ouest et du Sahel. Ce Port en eau profonde est situé à 70 km au nord de Dakhla, sa mise en service est prévue pour 2029, avec une capacité initiale de traitement d’environ 35 millions de tonnes de marchandises par an.
L’ambition du projet de port est de servir tout l’hinterland du Sahel, pour ce faire il devrait être relié au Sahel par un réseau de routes et rails à travers un corridor qui joindrait Dakhla au Sahel via un réseau estimé à 5000 km combinant routes et voies ferrées comprenant un tronçon de Dakhla à Bamako passant par la Mauritanie (environ 2 200 km) et des extensions ou des bretelles vers Niamey, N’Djamena et Ouagadougou.
Le projet du corridor pourrait être envisagé en deux ou trois phases, débutant par une phase initiale de deux ans axée sur la mise en place d’une structure de gestion (incluant un protocole d’accord, un cadre de coopération et un mécanisme de gestion), la promotion des échanges et le positionnement du corridor comme lien commercial ; la phase suivante, d’une durée de cinq ans, porte sur le suivi des mesures politiques et réglementaires, l’amélioration des infrastructures physiques, la préparation d’investissements de suivi et le développement national, ainsi que la mise en place d’un système de suivi et d’évaluation ; Le financement du projet est crucial et s’appuie sur les frais d’adhésion, les contributions des gouvernements, les redevances basées sur le trafic, et le soutien des donateurs. Ce projet nécessite une coalition internationale de donateurs et des partenaires de développement internationaux. (voir l’étude de pré faisabilité de la RTS/TAH, CNUCED BID).
Le corridor s’il est bien conçu pourrait réduire les coûts et les temps de transit pour les pays enclavés et surtout libérer le potentiel commercial inexploité dans cette région d’Afrique et diversifier les routes commerciales et renforcer la compétitivité des exportations et une réduction du coût des transactions commerciales de la région.
En partant de l’hypothèse que le corridor ouvrirait un accès direct à l’océan Atlantique via le port de Dakhla, il pourrait générer une augmentation significative des échanges commerciaux et des investissements inestimables, avec un potentiel additionnel de commerce estimé à 3,08 milliards de dollars (simulations scénario de réduire de 20 à 30 % le temps et les coûts d’exportation des pays du Sahel).
Les échanges commerciaux entre le Maroc, la Mauritanie et même le Sénégal avec les pays du Sahel (AES) pourraient progresser, générant des gains estimés à 85 et 80 millions de dollars respectivement scenario minimum.
D’ici 2035, le Corridor de Dakhla pourrait également générer plus de 150 000 emplois et diversifier les marchés, réduisant la dépendance envers l’Europe et l’Asie.
Les projections actuelles indiquent des gains substantiels pour les pays concernés, notamment en termes de réduction des coûts de transport, d’augmentation des volumes d’échanges commerciaux, de contribution à la croissance du PIB et d’amélioration du bien-être général.
Potentiel commercial entre le Maroc et les Pays de l’AES
Les exportations actuelles du Maroc vers les 4 pays du Sahel sont d’environ 300 millions de dollars, tandis que le potentiel commercial est estimé à 2,23 milliards de dollars, le taux de réalisation n’est que de 11,44 % en moyenne, laissant une marge de croissance importante. (calcul de l’auteur) si l’on ajoute la Mauritanie et le Sénégal le chiffre des exportations réelles grimpe à 1,5 milliard de dollars en 2022.
Les marchés à haut potentiel sont le Sénégal, le Mali et la Mauritanie, tandis que le Niger, le Burkina Faso et le Tchad sont des marchés émergents. Les secteurs à cibler sont l’agriculture, les matériaux de construction, le textile et les produits pharmaceutiques.
Il est recommandé de renforcer les accords commerciaux (envisager un accord avec l’UEMOA), d’investir dans la logistique et l’infrastructure et surtout la mise en place de chaines de valeur régionales pour élargir la gamme des produits échangés notamment dans le secteur du cuir, de la plasturgie et les produits de l’élevage.
Le Sénégal se distingue par un taux de réalisation de 25,26 %, tandis que le Niger (3,10 %) et le Burkina Faso (3,63 %) accusent un retard significatif.
Un scénario plus ambitieux, qui combinerait le corridor avec un système de préférences commerciales souple et progressif, augmenterait les bénéfices des parties prenantes comme le démontre la simulation ci après.
Impact d’une Zone Préférentielle élargie (en milliards de dollars us)
Indicateur |
Tchad |
Niger |
Burkina Faso |
Mali |
Mauritanie |
Augmentation des volumes d’échanges |
2,62–3,275 |
4,2–5,04 |
4,06–5,075 |
5,225–6,27 |
2,1–2,55 |
Contribution à la croissance du PIB |
0,524–0,655 |
0,504–0,672 |
0,406–0,609 |
0,627–0,836 |
0,315–0,525 |
Gains de bien-être |
0,786–1,3755 |
1,05–1,512 |
1,015–1,26875 |
1,575–1,881 |
0,525–0,75 |
D’ailleurs l’alinea 2 de l’article 19 de la ZLECAf , à l’instar de l’article 24 du GATT 94, laisse la porte ouverte aux pays africains de maintenir les préférences sous régionales intactes sans élargissement erga omnes aux autres pays africains membres par le jeu de la clause de la nation la plus favorisée en stipulant que « les États parties qui sont membres d’autres communautés économiques régionales, d’autres accords commerciaux régionaux et d’autres unions douanières, et qui ont atteint entre eux des niveaux d’intégration régionale plus élevés que ceux prévus par le présent Accord, maintiennent ces niveaux entre eux ».
Reste une autre option c’est la conclusion d’accords séparés de libre-échange par le Maroc, la Mauritanie et le Tchad avec l’UEMOA.
– En conclusion, le corridor N’Djamena-Dakhla est un projet ambitieux qui peut transformer la région du Sahel en favorisant le développement économique, l’intégration régionale et aux chaines de valeur mondiales. La réussite de ce projet nécessite une approche holistique, collaborative, et une participation de toutes les parties prenantes qui combine la planification spatiale, l’analyse économique, la prise en compte des aspects sociaux et environnementaux, ainsi qu’une coordination efficace entre les différentes parties prenantes. La priorité doit être de relier les zones de production et de consommation, de favoriser le commerce, et d’intégrer les communautés locales dans le processus de développement.
Les principaux défis à surmonter comprennent les risques en matière de sécurité en premier lieu, suivies de la mobilisation des financements des coûts élevés liés aux infrastructures et enfin la coordination politique.
Concernant le volet sécuritaire les stratégies d’atténuation des risques passe par les mesures sécuritaires mais aussi par des initiatives diplomatiques ou des médiations afin de sécuriser le trajet et de rassurer les pays concernés, en leur proposant un modèle de collaboration équilibré et inclusif des intérêts de toutes les parties.
Par ailleurs, l’histoire nous enseigne que dans tout processus de coopération/ intégration, ou même tout méga projet de dimension nationale, que ça soit un port un grand barrage ou un corridor, il y a des acteurs catalyseurs (core area) qui tirent vers l’avant, mais il y a eu presque toujours des acteurs qui tentent de freiner le processus ou le projet (counter core areas) par crainte de mettre en danger soit les intérêts acquis soit des projets futurs d’expansion.