Sport et institutions stables
Avec plus de 2000 groupes ethniques recensés sur le continent africain, la diversité culturelle rencontre souvent la fragmentation politique et les difficultés de développement sur le territoire
L’inclusion ethnique, est-elle toujours un gage de

Consultant IC- Intelligence Culturelle
croissance économique ? Les économistes Pecher et Gaspard en étudiant 41 États africains sub-sahariens démontrent qu’elle est positive pour le PIB lorsqu’elle est accompagnée d’institutions stables et démocratiques.
En Afrique, depuis des millénaires, les peuples s’adonnent à des sports traditionnels qui façonnent, encore dans de très nombreuses contrées en renouvelant, en consolidant des alliances sociales, politiques, morales et religieuses.

Le sport traditionnel, exprime l’amour de la vaillance chevaleresque et la bravoure, pour preuve. Voici quelques exemples de sports encore pratiqués : l’ukuli au sein du peuple Hamar, l’adossa au sein du peuple Didaouré, le njeuk au sein des populations Fang-Bëti, l’ampe chez le peuple Akan, le charo chez les Haoussas, la lutte sénégalaise avec frappe etc. témoignages vivants des cultures orale, sportive et artistique. C’est d’ailleurs dans cet esprit, que lors des Jeux de la Francophonie persiste une discipline «Lutte africaine.»
Sport et patrimoine

Les États sub-sahariens pourraient s’inspirer du Maroc, qui tout en combinant passé et présent, conjugue le sport, le patrimoine et l’économie. Le Maroc organisera d’ici 2030, plus de douze grands événements sportifs internationaux !
Le Maroc, se distingue par ses courses camelines pendant le Moussem de Tan-Tan ceci pour préserver les traditions authentiques du pays et le patrimoine culturel des bédouins nomades.
Depuis une quinzaine d’années, cette revitalisation a créé un mouvement économique, patrimonial, et sportif puissant, premier du genre au niveau de l’Afrique. Le Moussem de Tan-Tan est également un événement mondial inscrit depuis 2008 sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO).
Les Jeux de la Francophonie, l’accord parfait
Un autre exemple rare et remarquable, ce sont les Jeux de la Francophonie qui sont une compétition multisports associée à un ensemble de concours culturels, en épreuves individuelles ou par équipes. Ces concours sont organisés par le Comité international des Jeux de la Francophonie et le Comité national des Jeux de la Francophonie sous l’égide de l’Organisation internationale de la francophonie où le sport et la tradition ont leurs places.
L’objectif est de contribuer à la promotion de la paix et au développement à travers les rencontres et les échanges entre jeunes francophones, de permettre le rapprochement des pays de la Francophonie et de constituer un facteur de dynamisation de sa jeunesse, en contribuant à la solidarité internationale dans le respect de l’égalité entre les genres, de faire connaître l’originalité des cultures francophones dans toute leur diversité et développer les échanges artistiques entre les États et gouvernements francophones, de favoriser l’émergence de jeunes talents artistiques francophones sur la scène artistique internationale, de contribuer à la préparation de la relève sportive francophone en vue de sa participation à d’autres grands événements sportifs et finalement de contribuer à la promotion de la langue française.
4 Questions à :
Daniel Zielinski, délégué ministériel à la Francophonie sportive
La francophonie allie solidarité et recherche de performance au profit du développement de son espace
Après le Burkina Faso, le Québec, la Belgique, AFRIMAG va à la rencontre de M. Daniel Zielinski qui est délégué ministériel à la Francophonie sportive et haut fonctionnaire à la langue française pour le sport (France). Nous l’avons consulté sur la situation de l’influence du sport et de la francophonie.
AFRIMAG : Une stratégie de francophonie sportive s’impose aujourd’hui sur la base de trois constats : premièrement la langue française se développe aujourd’hui de manière forte.

Daniel Zielinski : Nous sommes aujourd’hui, 321 millions de locuteurs francophones, plus 4 millions en quatre années ! Cela représente dans le domaine du sport, un potentiel de 165 millions de supporters et de pratiquants et d’abonnés potentiels à des émissions spécialisées ! Portés à 60% par l’Afrique. Il est prévu que nous soyons dans quelques années environ 700 millions de locuteurs ! Ceci, contredit bien souvent ce que la majorité de francophones, mais surtout de français pensent de l’évolution de l’influence de leur langue.
AFRIMAG : Deuxièmement, l’espace francophone s’agrandit !
Daniel Zielinski : Oui, aujourd’hui, 93 Etats et gouvernements sont membres de l’OIF au travers de trois statuts différents. Les pays membres ne sont pas tous francophones, ils sont aussi francophiles, ou tout au moins intéressés par une dynamique en francophonie. Il nous faut nous y intéresser, et dialoguer avec ces pays afin de connaître leurs motivations pour la francophonie sportive afin d’imaginer des partenariats.
AFRIMAG : Enfin le sport semble être une valeur montante partout dans le monde, et un facteur de développement économique
Daniel Zielinski : Non seulement le nombre de pratiquants augmente, mais le sport participe à l’émancipation notamment pour les femmes, à la santé, le sport inclusif pour le handicap, le sport insertion. Le sport représente au niveau mondial, 1200 Milliards d’euros, soit 2% à 3% du PIB. Alors que la part du PIB dans le sport est seulement de 0,5% dans le continent africain. Le sport est une véritable industrie, une économie qui doit être aujourd’hui prise au sérieux. L’industrie des événements sportifs devient une locomotive. De plus en plus de pays francophones manifestent leur intérêt pour organiser des Grands événements sportifs internationaux (GESI) (Arménie 2027 Jeux de la Francophonie, Coupe d’Afrique des Nations, Rwanda championnat du monde cycliste en 2025, Guinée Équatoriale les Jeux de la plage en 2027, Sénégal Dakar les JOJ 2026…).
AFRIMAG : Qu’elle est la mission qui vous a été confiée par trois ministres : Sports, Culture et Francophonie ?
Daniel Zielinski : Améliorer l’influence du sport francophone, notamment sur l’aspect économique. Nous avons dans les pays francophones, de très belles et performantes entreprises du sport. Le mot «d’influence» n’est pas neutre ici, face au «lobby anglo-saxon.» Des économistes travaillent le sujet de la langue française comme atout économique dans l’espace francophone comme de Maria Masood ou François Grin, spécialistes de l’économie des langues.
Valoriser la langue française dans le sport
Tous les nouveaux sports nous viennent des pays anglo-saxons apportant ainsi leur langue et leur influence. A l’occasion des JOP, nous avons traduit tous les nouveaux sports olympiques (Break, Surf, Skate/planches à roulettes, escalade sportive, Parasport). Il nous faut «Déringardiser» le français dans le sport.
Initiative : un Groupe Interministériel et Interinstitutionnel «Le français, langue du sport et de l’olympisme en France et dans le monde» a été créé, à l’invitation du ministère de la Culture et du ministère des Sports et des Jeux olympiques et paralympiques (français). Ce groupe interministériel est présidé par Paul de Sinety, de la Délégation générale à la langue française et aux langues de France (DGLFLF) et j’en assure le secrétariat général.
Plusieurs groupes ont été créés afin de proposer des actions. Plus particulièrement, le groupe :« Entreprise du sport et Francophonie : Réseau, Influence et Langue Française » animé par Bruno Lalande en lien avec la délégation ministérielle a créé le premier réseau d’influenceurs de la francophonie sportive. Celui-ci est composé de tous les acteurs du sport (privés, publics, athlètes, médias…) intéressés à développer la francophonie sportive et à valoriser la langue française. Aujourd’hui il est composé de plus de 250 personnalités dans 43 pays qui se sont engagées dont 60 membres sur le continent africain à date.
L’accueil des Jeux Olympiques et des Jeux Paralympiques de Paris 2024 a été à ce titre : une chance non seulement pour le rayonnement de la France, mais également pour l’influence de la francophonie. Par les multiples événements que nous avons organisés, nous avons rencontré de très nombreux ministres, comités olympiques, institutions, diplomates du monde francophone, et cela nous a permis d’écrire les bases d’une stratégie pour les années à venir. Vouloir développer la langue française pour le sport, et la francophonie sportive, contribue à améliorer l’influence francophone à l’international ! Le chemin à parcourir est encore long mais le cap est clair : pour être vecteur d’influence demain, la francophonie doit aujourd’hui s’attacher à faire rêver. Le sport y contribue !