La décarbonation du transport aérien est inévitable et ce pour plusieurs raisons. D’abord c’est le défi qu’avait lancé Giovanni Bisignani alors dirigeant de IATA dès le début des années 2000 en fixant comme objectif qu’elle soit réellement accomplie en 2050. Je note que depuis près de 20 ans, la date n’a pas été remise en question alors que les difficultés s’amoncellent. Ensuite c’est une question d’éthique du transport aérien vis-à-vis des habitants de la planète. Ce secteur d’activité a une responsabilité particulière car il est celui qui unit les populations, il est facteur de paix et de prospérité économique. C’est enfin une affaire de gros sous, car moins le transport aérien sera consommateur d’énergie fossile et plus il sera rentable. Le coût du carburant atteint jusqu’à 30% des charges d’une compagnie aérienne en période de renchérissement du cours du

pétrole
Une fois le constat fait et sachant qu’il ne sera pas remis en question, la question est de savoir comment procéder. Comment financer la recherche qui amènera à produire des moteurs non polluants et des appareils construits avec de nouveaux matériaux, plus résistants, plus légers et d’autres termes plus performants. Qui va mener les recherches, comment vont-elles être financées et comment le transport va-t-il résister à la pression écologique qui a largement influencé la classe politique dirigeante ?
Décarbonation, faut-il craindre les politiques publiques en matière de recherche ?
De deux choses l’une : ou bien le transport aérien dans son ensemble prend le sujet à bras le corps ou les dirigeants politiques s’en empareront et alors tout sera à craindre. En effet il est très facile de faire de la démagogie en tapant sur un mode de transport soi-disant réservé aux riches lesquels restent encore une minorité de votants et de plus crée des nuisances à des populations qui ne voyagent jamais en avion mais qui votent. C’est ainsi qu’on commence à voir en Europe des limitations administratives infligées à ce mode de transport que ce soit en interdisant tout simplement certaines dessertes, ou en limitant le nombre de mouvements sur les aéroports. Ce qui se passe en Europe pourrait d’ailleurs bien se propager sur le continent asiatique dans un avenir rapproché.
Alors le transport aérien dans toutes ses composantes serait bien inspiré de prendre directement les affaires en main avant que les Etats s’en occupent. On pourrait d’ailleurs facilement imaginer un scénario où les gouvernements taxent le transport aérien sous couvert de financer la recherche en utilisant les sommes prélevées pour subventionner le transport terrestre, ferroviaire en particulier. Cela a d’ailleurs déjà commencé.
Transition écologique : le transport aérien doit prendre les devants
Alors il faut dégager les ressources pour la transition écologique et tous les acteurs doivent s’y mettre : constructeurs, transporteurs, aéroports et toute la chaine des fournisseurs de services. Comment procéder ? D’abord pourquoi ne pas décider la création d’une unité économique mondiale, neutre, composée de représentants de chaque secteur : IATA, mais également l’ACI et les syndicats de producteurs et de distributeurs, qui aurait pour objet de collecter l’argent nécessaire non seulement à la recherche mais également à la communication du transport aérien et à répartir cette manne entre les projets sélectionnés. Car le transport aérien ne peut pas attendre les aides financières extérieures, il devra bien trouver tout seul les ressources nécessaires en évitant qu’elles ne disparaissent dans les budgets généraux des Etats.
Mutualiser les montants mirifiques prélevés pour décarbonner
Prenons une hypothèse : les compagnies aériennes contribuent à hauteur de 1 dollar par passager, cela fait déjà 5 milliards de dollars par an, ajoutons les aéroports dont la contribution pourrait être identique ; voilà encore 5 autres milliards. A ce montant déjà considérable, les constructeurs pourraient apporter 0,5% de leur chiffre d’affaires, comme les compagnies aériennes ou les aéroports, à raison de 2000 appareils vendus par an à un prix moyen de 100 millions de dollars par avion, cela fait encore 10 milliards de dollars. Or chacun traite sa décarbonation dans son coin alors que mis ensemble on voit bien que les budgets de recherche et de communication peuvent atteindre rapidement des montants considérables. Et cela sans compter les apports des avitailleurs, et des distributeurs. En fait il serait possible de lever tous les ans autour de 40 milliards de dollars pour financer la recherche et la communication sans qu’ils soient, au mieux, dilués dans les budgets généraux des pays et au pire qu’ils servent à alimenter la concurrence.
Le transport aérien devra bien payer d’une manière ou d’une autre, mais cet argent ne devra pas service à autre chose que sa propre décarbonation. A lui de s’organiser pour cela. Le temps presse, et les ennemis du transport aérien sont à l’affut.